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36-KARABASH, ORIGINAIRE DE LA MESOPOTAMIE ? Janv 2010 Certaines sources occidentales, bien au-delà des hypothèses, affirment que le Karabash est originaire de la Mésopotamie.
Nous pensons au contraire que la Mésopotamie n’a jamais été le berceau d’aucun chien de protection de troupeaux.
Traditionnellement, les basses terres fertiles, irriguées naturellement par des fleuves, comme la Mésopotamie, ont toujours été utilisées pour l’agriculture, par une population sédentaire. Parallèlement, les terres plus ou moins arides des hauts plateaux avec des ressources limitées notamment en eau sont destinées à l’élevage de moutons par une population nomade. Tout oppose ces deux modes de vie. L’implantation de l’un se fait obligatoirement par la disparition de l’autre. Cette incompatibilité était la source de beaucoup de conflits armés et de guerres interminables dans l’histoire. La Mésopotamie n’a jamais été une terre d’élevage. Le chien de protection de troupeaux est un élément indissociable de la vie, de l’existence même des nomades. Aller chercher l’origine d’un chien de protection de troupeaux sur des terres qui n’ont jamais été destinées à l’élevage et poursuivre cette recherche auprès de populations qui n’ont jamais été des nomades, ne nous paraient pas crédible.
Pour certains cynophiles, il est permis de supposer que les Sumériens (3500-2000 avant notre ère), peuple d’origine non-sémitique, venu, peut-être de l’Asie pour s’installer au sud de la Mésopotamie ont emmené ces chiens de l’Asie. Si c’est le cas, c’est déjà la preuve en soi que l’origine du Karabash n’est pas la Mésopotamie mais bien l’Asie. Néanmoins, cette hypothèse ne nous paraît pas vraisemblable.
« Le nom Sumer ou Shumer, écrit en cunéiforme KI.EN.GI, désigne une région de la basse Mésopotamie antique (actuellement la partie Sud de l'Irak) en bordure du golfe Persique (situé à cette époque au nord-ouest de l'actuel golfe). Il a donné son nom aux Sumériens, peuple non sémitique d'origine mal connue, qui y était établi au IVe millénaire av. J.-C.. Elle constitue la première civilisation véritablement urbaine et marque la fin de la préhistoire au Moyen-Orient, la plupart des cultures de cette région seront plus ou moins influencées pendant toute la haute antiquité et la moyenne antiquité. » (Wikipédia) « La civilisation sumérienne est apparue selon Jean Margueron du fait que l'épeautre - céréale poussant naturellement depuis des millénaires à proximité des berges du Tigre et l'Euphrate - a permis il y a 9000 ans à l'homme d'alors de se sédentariser en remplaçant le besoin de s'alimenter au jour le jour par la possibilité de stocker des céréales, donc des aliments, sur une année. Cette mutation décisive induisit les premières structures urbaines, rendant nécessaires des travaux d'irrigation d'une exceptionnelle ampleur, sur des milliers d'hectares. La civilisation sumérienne se développa en inventant l’écriture et l’architecture. » (Wikipédia)
Civilisation véritablement urbaine, stockage de céréale qui a permis la sédentarisation il y a 9000 ans, travaux d’irrigation d’une exceptionnelle ampleur, invention de l’écriture et de l’architecture… nous sommes loin, très loin de la civilisation pastorale des nomades.
Pour d’autres, provenant notamment de sources plutôt anglo-saxonnes, l’origine du Karabash remonte aux Assyriens. C’est toujours la Mésopotamie mais ce sont les dates et lieux qui diffèrent. Les défenseurs de ce point de vue considèrent comme preuve l’existence des figures de chiens dans les fouilles archéologiques dans cette région du monde.
Déjà, la découverte de ces bas reliefs constitue-t-elle une certitude de l’existence de ces chiens en Mésopotamie ? Scientifiquement parlant, non. A nos jours aucun ossement n’a été retrouvé.
Ces bas reliefs, exposés au British Museum à Londre, ont été découverts dans la ville de Ninive, à l’intérieur des frontières de l’Irak d’aujourd’hui. Il s’agit de chiens de type molossoïde avec une grosse tête et des côtes apparentes. La plupart des oreilles ne sont pas triangulaires, leur queue, souvent en forme d’épée, parfois en boucle sur la croupe dénotent déjà la diversité de leurs origines. Ces chiens portent en eux toutes les caractéristiques des chiens de type mastiff qui sont à l’opposées de la morphologie des chiens des grandes steppes.
De plus, la morphologie du Karabash et de ses proches cousins est incompatible avec le climat chaud et humide de la Mésopotamie. Il n’y a ni Karabash ni un de ses cousins sur ces terres aujourd’hui.
Le chien de protection de troupeaux ne peut être qu’originaire de vastes territoires dans lesquels se pratiquait l’élevage à grande échelle, par une population nomade par tradition qui se déplaçait au gré des saisons, à la recherche de pâturages gras. C’est dans ce mode de vie que l’existence du chien de protection était indispensable. Cet environnement est, en même temps, le milieu naturel du loup et de divers prédateurs.
Au vu du regard du chien, la distance de
tolérance a été quelque peu franchie.
Il vaut mieux respecter son travail de
protection et s’éloigner sans précipitation.
Özükavak, Çekerek, Yozgat
Chez les mammifères, dans une espèce donnée, la taille des sujets dans les régions froides est plus grande que dans les régions tempérées. Plus le corps est grand, plus le rapport superficie/volume est petit, ce qui permet de maintenir plus aisément la température interne du corps. Les grands chiens ont donc pour origine les régions plutôt au nord de l’hémisphère nord. Le Karabash, un des plus grands représentants de la gent canine, appartient à une espèce dépourvue de glandes sudoripares, pour ces raisons il ne peut pas être originaire de la Mésopotamie scientifiquement parlant, les biologistes vous le diront.
Ces grands chiens de type plutôt molossoïde utilisés probablement pour la chasse et apparemment pour la guerre, ne sont, s’ils ont existé en Mésopotamie, absolument pas de type Karabash. Les populations des différentes civilisations sur ces terres étaient surtout composées d’agriculteurs et de commerçants donc sédentaires, les plus aisés d’entre eux auraient fait venir ces molossoïdes de guerre, de garde, de chasse, peut-être aussi de combat pour leur propre compte, pour leur propre divertissement. N’oublions pas que le commerce entre l’Europe et le moyen orient a toujours existé.
Où sont les descendants de ces molossoïdes en Mésopotamie aujourd’hui ? Il est à souligner que dans ces mêmes fouilles archéologiques, il n’y a aucune figure représentant un de ces molossoïdes avec un troupeau ou un berger.
Pourquoi chercher l’origine du Karabash sur les pierres de la Mésopotamie alors qu’il continue à prospérer en chair et en os en Asie Centrale, son pays d’origine ?
Comme le précise bien Doğan KARTAY, le plus grand nombre de figures et de reliefs de lions se trouvent à Rome, cela ne veut pas dire que le lion est originaire de Rome.
Karabash, moutons, bergers riment avec espace et liberté
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© DERBENT Anne-Marie 2006 |